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L’emprisonnement à vie d’Osman Kavala décidé, sans faits avérés, par un juge affilié à l’AKP, vient de donner une fois de plus la preuve que la République de Turquie ne pratique en rien la séparation des pouvoirs que tout pays dit européen est tenu d’appliquer. Sourd aux idéaux institutionnels reposant sur le droit, mais attaché à son égocentrisme nationaliste, le président turc a même le culot de se sentir humilié par les bouderies des Européens devant les multiples tentatives faites pour être accepté parmi eux et se constituer ainsi une virginité qui effacerait d’un trait tout négationnisme, emprisonnement arbitraire, massacres et autre occupation illégale d’un territoire.
Pour chaque citoyen européen, cet emprisonnement arbitraire, voulu par le président en exercice et exécuté par juge interposé, est la goutte d’indignation qui fait déborder le vase des indignités.
C’est bien connu. Tout démocrate est la bête noire de l’autocrate qui ne règne que par la terreur. Et c’est même à ça qu’on le reconnaît.
Outre Osman Kavala, les prévenus Mücella Yapici architecte, Çigdem Mater, documentariste, le militant des droits civiques Ali Hakan Altinay, la réalisatrice Mine Özerden, l’avocat Can Atalay, l’universitaire Tayfun Kahraman et le fondateur d’ONG turques Yigit Ali Emekçi, ont été condamnés à dix-huit ans de prison chacun, pour complicité du même chef d’accusation.
Affirmer sans preuve que ces citoyens turcs cherchaient à « renverser le gouvernement de la république de Turquie » pour soutenir qu’ils seraient à l’origine des manifestations antigouvernementales du parc Gezi, à Istanbul, au printemps 2013, est une condamnation qui provoque la colère quand on sait que les accusés défendent une république républicaine contre les agissements d’une démocratie autocratique.
En tant que citoyens européens, nous demandons aux instances européennes de considérer comme infréquentable un président qui pratique le double langage, dont le seul intérêt est de défendre ses propres ambitions, quitte à manger à tous les râteliers, quitte à cracher dans toutes les soupes, pourvu que ses pions avancent et que ses appétits se concrétisent.
En tant que citoyens européens, nous demandons que les sanctions appliquées à l’autocrate Poutine n’épargnent pas l’autocrate Erdogan. Si l’Europe ne supporte pas le sang qui souille le gaz russe, pourquoi continuer à considérer comme acceptable une Turquie malade de ses peurs, de son arbitraire, de ses visées expansionnistes, tandis que son histoire aujourd’hui est aussi sanguinaire que celle d’hier. Aujourd’hui l’Ukraine envahie par un despote impérialiste comme le furent la Tchétchénie, la Syrie et la Géorgie, demain quel autre pays après Chypre, la Syrie par celui qui n’en fait qu’à sa tête en supprimant celle des autres ?
Il faut sauver Osman Kavala, Mücella Yapici, Çigdem Mater, Ali Hakan Altinay, Mine Özerden, Can Atalay, Tayfun Kahraman et Yigit Ali Emekçi…
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