Ecrittératures

30 mars 2013

Vivre en écriture (6)

DNA

Emotion longue : Le Centre d’Etudes Arméniennes

Au début des années soixante, j’entre dans une jeune association arménienne, le Centre d’Etudes Arméniennes, créée par le docteur Georges Khayiguian et qui va regrouper aussi bien d’anciens élèves du Collège Samuel Moorat ( comme Kéram Kévonian, Manoug Atamian,  Vartkès Solakian, Jacques Donabédian,  etc.), que des personnalités de tous bords ( comme Jacques Nazarian, Robert Donikian et son épouse Emma) farouchement engagées dans la remémoration  active du génocide de 1915. C’est le CEA ( et aucun autre parti, comme on voudrait nous le faire croire) qui sera à l’initiative des premières commémorations du 24 avril, de la fermeture des magasins en signe de deuil et de la brochure Le Deuil National Arménien, alors que les livres  sur l’actualité du génocide étaient pratiquement inexistants. Cette brochure sortie à l’occasion du cinquantième anniversaire contiendra en germe tout ce qui sera écrit par la suite. Des manifestations monstres, avec photos à l’appui, seront organisées à Marseille (où je me rends pour organiser la mise en place d’une projection à la Salle Vallier), à Lyon et à Paris. J’écris alors mon premier recueil de poème très influencé par mes activités de militant, intitulé Le Lieu Commun, dans lequel j’évoque le génocide mais aussi mon sentiment d’exil. A l’époque, le sujet du génocide était tabou en Turquie. Après la déliquescence du mouvement et le relais pris par d’autres associations, la pression sur les autorités publiques va gagner en ampleur. Elle aboutira à l’évocation des événements de 1915 à Vienne même par le président François Mitterand en janvier 1984. “Il faut que cela s’inscrive dans la mémoire des hommes, il n’est pas possible d’effacer sa trace”, dira-t-il, affirmant que la France voudrait “rappeler l’identité arménienne marquée par le grand drame du génocide”. Aveuglé par mon admiration pour le docteur Khayiguian, comme l’étaient tous mes camarades, je me rendrai compte assez tard des dérives fascisantes du CEA, mais aussi des formes d’intolérance et d’espionnite malsaines qui y sévissaient. Mon service militaire sera une occasion pour prendre mes distances. J’ai 26 ans et je décide à ma libération de poursuivre des études  en Arménie. Mais en réalité pour y écrire un livre que j’avais en tête sur les conditions de vie des Arméniens alors soumis au régime soviétique, et qui s’intitulera EHTNOS.

(à suivre)

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