Ecrittératures

24 juin 2015

Haratch, journal arménien.

Filed under: Uncategorized — denisdonikian @ 6:12
Tags: ,

ArpikMissakian

Arpik Missakian

1 – Dans son éditorial du 16-17 mai 2009, Arpik Missakian comparait sa décision de cesser au 31 du mois la parution du journal Haratch à « la mort définitive » de son fondateur, Chavarche Missakian, son père. En assurant sa succession, elle l’avait maintenu en vie durant plus de 50 ans, au prix de nombreux sacrifices. Dernier quotidien arménien d’Europe occidentale, Haratch aura été confronté à la concurrence des moyens modernes d’information et à l’érosion du lectorat communautaire et arménophone. Emprunté à l’organe du SPD (parti social-démocrate allemand) publié à Leipzig par Wilhem Liebknecht et intitulé Vorwärtz (En Avant), Haratch fut créé juste après le 10ème Congrès de la FRA à Paris (novembre 1924- janvier 1925).

2 – Né à Zmara, près de Sébastia (Sivas), en 1884, Chavarche Missakian, après avoir travaillé pour les journaux dachnak Droschak et Razmig, va créer avec Zabel Essayan l’hebdomadaire littéraire Aztak et la librairie Ardziv. Entré dans la clandestinité en avril 1915, mais dénoncé, arrêté et torturé l’année suivante, il sera libéré après l’armistice. Après avoir été rédacteur en chef du quotidien de la FRA, Azadamard, il s’exile à Sofia où il se marie avec Dirouhie Azarian. Le journal Haratch, qu’il fonde à Paris en 1925, lui permettra de structurer la communauté arménienne de France. Son éditorial du 9 décembre 1945, intitulé « Génocide », fera la preuve que le terme de Lemkin pouvait s’appliquer aussi aux évènements de 1915. Il sera enterré au Père Lachaise le 31 janvier 1957 après des funérailles nationales.  

3 – La fréquentation de la direction de Haratch destinait Arpik Missakian, née en 1926, à assumer l’héritage paternel, grâce aussi à sa connaissance de la communauté arménienne et de l’arménien occidental, et aux soutiens de Chavarche Nartouni (1898-1968) et de Hrand Samuel (1891-1977) qui fournira un éditorial quotidien durant 20 ans. L’histoire tourmentée des Arméniens trouvera place dans plusieurs rubriques : « Front arménien », « Artsakh », « Bolis », « Génocide », etc., permettant ainsi un juste équilibre entre l’Arménie et la diaspora. Le supplément littéraire mensuel de 4 pages, Midk yèv Arvest (Pensée et Art), créé en décembre 1976, mettra en circulation les idées dans tous les domaines. Arpik Missakian sera inhumée au Père Lachaise le 25 juin 2015.

4 – En entrant en 1984 dans la direction de Haratch, Arpi Totoyan, née en 1945 à Istanbul, apportait sa connaissance du turc et de l’arménien occidental. Son arrivée coïncidera avec les bouleversements que connaît alors l’Arménie : Perestroïka, séisme de 1988, effondrement de l’URSS, accession à l’indépendance, libération du Haut-Karabagh, revendication de la diaspora pour la reconnaissance du génocide arménien… De son côté, Dirouhie Missakian, née Azarian (1891-1964), qui fut enseignante à Dörtyol en 1913, puis comptable du journal Djagadamard, non seulement elle soutint son mari, signant des billets d’humeur sous les pseudonymes de Sossi ou Nodji, mais fut aussi l’une des fondatrices de la Croix Bleue des Arméniens de France.

5 – Après plusieurs changements d’adresse et d’imprimerie, Haratch s’installa en 1973 au 83 rue de Hauteville à Paris, dans une pièce pour la rédaction et un atelier pour la linotype de marque allemande acquise en 1953. Devenu quotidien en 1927, Haratch, de format 32/50, distribué par abonnement et vendu en banlieue parisienne ou dans certains kiosques, comportait toujours l’éditorial de Charvarche, Mèr Khoske (Notre Parole), un billet, des analyses politiques ou littéraires, et un feuilleton ouvert aux jeunes écrivains.      

4 commentaires »

  1. Merci Denis pour ce post.
    J’ai eu la chance de rencontrer Madame Arpik Missakian à plusieurs reprises. Une femme sympathique et de grande valeur.
    Je n’oublierai jamais ce bon souvenir que j’ai d’Elle.

    J’aime

    Commentaire par Alain BARSAMIAN — 24 juin 2015 @ 7:33

  2. Une stèle de belle taille devrait être érigée dans la cour de l’Eglise arménienne de la rue Jean Goujon rendant un juste hommage à Chavarch Missakian , à Madame Arpik Missakian et à Hrant Samuelian . C’est bien le minimum que nous leur devons .

    J’aime

    Commentaire par Donig — 24 juin 2015 @ 9:13

  3. J’ai lu le récit de Chavarche Missakian, « Face à l’innommable Avril 1915 » et j’ai découvert sa vie de d’homme de conviction et de courage.
    De la torture que lui a fait subir la police quelques temps après la rafle, il a gardé des traces physiques mais sont mental est resté inébranlable.
    C’est un homme de grande envergure que j’ai découvert, qui a certainement influencé de nombreux intellectuels.
    Bien sûr que l’évolution technologique condamne la presse écrite de façon presque irrémédiable.
    Je crois qu’il y a maintenant le « Nor Haratch » sur le web et c’est tant mieux !

    J’aime

    Commentaire par antranik21 — 27 juin 2015 @ 9:29

  4. Enfant et jeune adolescent, j’ai habité au 83, rue d’Hauteville où Haratch se concevait et s’imprimait. J’ai donc de nombreuses fois croisé Mme Missakian (qui sous son air sévère me semblait être une personne bienveillante – elle tolérait que je joue au foot dans le hall de l’immeuble, même si cela ne pouvait pas faire davantage de bruit que l’impression du journal). Il y avait deux ouvriers typographes également. Quelqu’un sait-il ce que sont devenus le bureau de Mme Missakian et l’imprimerie sous la verrière? Merci par avance!

    J’aime

    Commentaire par Pierre-Olivier Cervesi — 24 août 2022 @ 12:56


RSS feed for comments on this post. TrackBack URI

Laisser un commentaire

Propulsé par WordPress.com.