Ecrittératures

28 avril 2015

UN CERCLE D’HISTOIRES (16)

Filed under: UN CERCLE D'HISTOIRES — denisdonikian @ 6:43

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dans une lumière qui n’avait pas la vulgarité des éclairages urbains et qui ne ressemblait en rien aux luminosités données par le soleil, même les plus vastes ou les plus ardentes. J’étais debout dans un décor de signes inhabituels. Je reconnus ces formes en angle ou demi-cercle qui m’avaient agité l’esprit quelques instants auparavant. Et en effet, autour de moi, s’élevaient des montagnes rondes et des triangulaires, sur la face desquelles s’étaient figées des flammes jaunes, des rouge sang et des vertes qui fusionnaient pour créer des couleurs insolites. J’étais submergé par le lieu. Je me sentais à l’unisson de cet incendie qui ne consumait rien, comme si j’avais toujours eu envie d’être là, citoyen de cet ailleurs retrouvé. Je demeurais debout, les bras ballants et j’attendais quelque chose. Mais qu’est-ce que j’attendais ? Une impression qui ne m’avait pas lâché, celle-là. J’avais un creux au plus profond. Qui doit venir me prendre ? J’étais de plus en plus perplexe, d’autant que je sentais peser sur moi un regard impossible à déterminer. Il était partout, il remplissait le temps, pas une seconde qui ne fût infusée de sa présence. J’avais beau faire… Mais qu’est-ce que je pouvais faire vraiment pour habiter ce temps moi aussi ? Plutôt, qu’avais-je fait pour être ainsi tenu à l’écart ? C’est alors que je le vis. Un œil, aussi gros que ma propre tête, était braqué sur moi,

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un œil puissant, prêt à me prendre en défaut. Il me transperçait l’esprit, il cherchait à orienter mes gestes. Suspendu dans l’air, il m’obligeait à lever la tête. Il dominait le monde…

27 avril 2015

UN CERCLE D’HISTOIRES ( 15)

Filed under: UN CERCLE D'HISTOIRES — denisdonikian @ 8:18

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de têtes humaines, sur lequel chevauchaient des spectres armés de lances redoutables. Un froid d’acier montait vers moi me saisissant aux jambes, je me sentais devenir aussi dur que du métal. Brusquement, je me rendis compte que je marchais sur la lame d’un cimeterre géant dont la pointe recourbée rejoignait le sol. Des créatures aux bras multiples, aux mains en forme de crocs, m’offraient le spectacle de leur laideur pour m’effrayer. Elles exerçaient sur mon esprit une telle force de fascination qu’à certains moments j’éprouvais de brèves pertes de conscience. À ce jeu-là, j’étais sûr de me trouver bientôt la proie de ces shylocks. Par chance, j’étais armé d’une épée et d’une dague, et je comptais bien en user le cas échéant. Qu’est-ce que j’avais fait pour qu’une aussi violente situation, vieille comme le monde, me fût donnée ? J’étais comme un vivant dans la trame d’un livre confronté aux démons les plus intraitables ? Et visiblement, ils n’avaient pas d’autre but que de me précipiter à terre et de me faire la peau. Certes, la vie d’un homme est fleurie de dangers et de catastrophes. J’avais beau savoir ça, je me demandais encore pourquoi j’avais été désigné pour affronter cette voie dont je ne comprenais pas l’issue. Aie confiance ! me disais-je, aie confiance ! tandis que les sales gueules rôdaient autour de ma vie. Je craignais à tout moment de me trouver sur la partie courbe de la lame. Cette obsession provoquait dans ma tête des figures de cercles et d’angles qui s’entremêlaient, des profils de sphères et de pics rocheux. Je serrais si fort mon épée et ma dague qu’elles disparurent. Mes mains ainsi vidées se détendirent, et mon corps tout entier qui venait tout juste d’échapper à la frénésie du combat se retrouva plongé aussi ? Plutôt, qu’avais-je fait pour être ainsi tenu à l’écart ? C’est alors que je le vis. Un œil, aussi gros que ma propre tête, était braqué sur moi,

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Précision :
Pour ceux qui ne l’auraient pas compris, la fin de chaque texte est le début de celui qui suit. De sorte qu’il s’agit d’un livre non linéaire, mais circulaire. Le texte numéroté 1 ( par convention), est en fait dans la continuité de celui qui sera le (faux ) dernier, à savoir le 16. C’est pourquoi le titre est Un cercle d’histoires. Dans ce cas précis, les sculptures ont été faites avant, selon l’impulsion du moment. En les rangeant sur la très longue table de mon atelier, en forme de cercle, j’ai pensé que je pouvais écrire une et des histoires à partir des sculptures. Donc, dans un cessons temps,  le texte a été déterminé par les sculptures. Mais le travail achevé, il s’est avéré que l’écrit et les formes se complétaient. L’écrit déchiffrant l’énigme des formes sans pour autant les épuiser. Cette interaction permet de dire des choses et d’aller vers des inconnus.
(Je tiens à préciser que tout cela n’a rien à voir avec les Arméniens, même s’il m’arrive de faire appel à mes propres cauchemars)

26 avril 2015

UN CERCLE D’HISTOIRES (14)

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cinq avions couchés les uns près des autres devant une statue de bouddha en état de méditation. Il ne s’agissait pas d’un cimetière pour vieux coucous mis au rancart. C’étaient de grands voyageurs endormis. Ils avaient connu des pays, traversé des espaces, accompagné des nuages, réuni des hommes. Et voilà qu’ils étaient fatigués. Ils avaient quitté leur lieu d’attache pour rejoindre cet îlot hors du temps. Ici, ils oubliaient toute frénésie liée aux envols, aux horaires, aux escales. Ils étaient comme des fidèles recueillis, soumis à la dévotion du bouddha. Ils n’entendaient plus les bruits lourds des moteurs, ni les sifflements de l’air quand leurs ailes coupaient le vent, ils n’éprouvaient plus ni vertige, ni solitude, ni ce froid qui règne dans l’espace. L’homme dieu les réconciliait avec le vide qu’ils fréquentaient quotidiennement. Leur métal ne hurlait plus. Il s’humanisait par le silence. Je me régalais de cette limpidité. Elle m’éclairait intérieurement. J’étais une souris dans la Jouvence… Mais voilà. J’ai glissé de ma boule blanche et j’ai basculé dans un autre univers. Un air glacial me brûlait la plante des pieds. J’étais debout sur une sorte de passerelle réduite à un fil, c’est dire combien était précaire ma position. Je devais me maintenir en équilibre pour éviter de tomber. Tomber où ? Allez savoir. Un sol rouge, jonché

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Précision :
Pour ceux qui ne l’auraient pas compris, la fin de chaque texte est le début de celui qui suit. De sorte qu’il s’agit d’un livre non linéaire, mais circulaire. Le texte numéroté 1 ( par convention), est en fait dans la continuité de celui qui sera le (faux ) dernier, à savoir le 16. C’est pourquoi le titre est Un cercle d’histoires. Dans ce cas précis, les sculptures ont été faites avant, selon l’impulsion du moment. En les rangeant sur la très longue table de mon atelier, en forme de cercle, j’ai pensé que je pouvais écrire une et des histoires à partir des sculptures. Donc, dans un cessons temps,  le texte a été déterminé par les sculptures. Mais le travail achevé, il s’est avéré que l’écrit et les formes se complétaient. L’écrit déchiffrant l’énigme des formes sans pour autant les épuiser. Cette interaction permet de dire des choses et d’aller vers des inconnus.
(Je tiens à préciser que tout cela n’a rien à voir avec les Arméniens, même s’il m’arrive de faire appel à mes propres cauchemars)

23 avril 2015

UN CERCLE D’HISTOIRES (13)

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se cabrait devant une meute de violons agressifs qui baignaient dans le sang. Des figures de noyés tantôt émergeaient des flots, tantôt plongeaient dans les profondeurs. Une lutte impitoyable se livrait dans mon imagination entre deux puissances antagonistes. Le cheval s’énervait en frappant des sabots pour éviter l’encerclement, tandis que les archets brandissaient leurs pointes pour l’atteindre au ventre. Du sang coulait sur la robe de l’animal et sa vue le rendait plus fou que jamais. Brusquement, il s’abattit sans crier gare sur le premier violon qui avait rampé pour le toucher au flanc gauche. Les cordes lancèrent un gémissement désarticulé. D’autres prenaient aussitôt la relève et tentaient une approche. Mais le cheval rendait leurs mouvements hésitants par ses attaques imprévisibles. Le spectacle des violons fracassés et de la bête en proie à leurs assauts me causait une sombre agitation. Que voulaient signifier ces charges instrumentales contre un animal qui défendait sa vie ? Au même instant, une mutation s’opéra dans mes images. À la place des violons et du cheval, apparurent

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Précision :
Pour ceux qui ne l’auraient pas compris, la fin de chaque texte est le début de celui qui suit. De sorte qu’il s’agit d’un livre non linéaire, mais circulaire. Le texte numéroté 1 ( par convention), est en fait dans la continuité de celui qui sera le (faux ) dernier, à savoir le 16. C’est pourquoi le titre est Un cercle d’histoires. Dans ce cas précis, les sculptures ont été faites avant, selon l’impulsion du moment. En les rangeant sur la très longue table de mon atelier, en forme de cercle, j’ai pensé que je pouvais écrire une et des histoires à partir des sculptures. Donc, dans un cessons temps,  le texte a été déterminé par les sculptures. Mais le travail achevé, il s’est avéré que l’écrit et les formes se complétaient. L’écrit déchiffrant l’énigme des formes sans pour autant les épuiser. Cette interaction permet de dire des choses et d’aller vers des inconnus.
(Je tiens à préciser que tout cela n’a rien à voir avec les Arméniens, même s’il m’arrive de faire appel à mes propres cauchemars)

19 avril 2015

UN CERCLE D’HISTOIRES (12)

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puisque je me sentis pénétré de grognements extravagants, si grotesques que j’avais du mal à me les représenter. Ils étaient sourds, plaintifs, primitifs, avec des accents de mère douloureusement contrariée. Mon cerveau d’animal captait des signes, mais s’énervait de ne pouvoir dessiner autour d’eux une silhouette familière. J’étais couché sur le dos, les membres écartés, la tête renversée, les yeux figés dans l’attitude arrêtée d’un mort. Est-ce que j’étais mort ? Est-ce que c’était encore moi ? Allez savoir. Mes ailes couvraient la machine qui m’avait sans doute liquéfié le cerveau. Une machine avec des fils dans tous les sens, mais des sens ordonnés par une intelligence monstrueuse. Et voici que l’hier le plus lointain rencontrait des possibles imaginaires comme si un illuminé d’écriture avait brutalement réuni dans ses mots des extrêmes incompatibles dans la réalité, dinosaures et ordinateur par exemple. Dans ma tête se mariaient un passé d’avant l’homme et une chose qu’il aurait conçue de toutes pièces. Autant d’alliances déraisonnables, propices à me faire quitter le cours ordinaire de la vie. Un cheval

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Précision :
Pour ceux qui ne l’auraient pas compris, la fin de chaque texte est le début de celui qui suit. De sorte qu’il s’agit d’un livre non linéaire, mais circulaire. Le texte numéroté 1 ( par convention), est en fait dans la continuité de celui qui sera le (faux ) dernier, à savoir le 16. C’est pourquoi le titre est Un cercle d’histoires. Dans ce cas précis, les sculptures ont été faites avant, selon l’impulsion du moment. En les rangeant sur la très longue table de mon atelier, en forme de cercle, j’ai pensé que je pouvais écrire une et des histoires à partir des sculptures. Donc, dans un cessons temps,  le texte a été déterminé par les sculptures. Mais le travail achevé, il s’est avéré que l’écrit et les formes se complétaient. L’écrit déchiffrant l’énigme des formes sans pour autant les épuiser. Cette interaction permet de dire des choses et d’aller vers des inconnus.
(Je tiens à préciser que tout cela n’a rien à voir avec les Arméniens, même s’il m’arrive de faire appel à mes propres cauchemars)

18 avril 2015

UN CERCLE D’HISTOIRES (11)

Filed under: UN CERCLE D'HISTOIRES — denisdonikian @ 5:50

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minuscule qui reposait sur une boule blanche, au-dessus de la mêlée. Qu’est-ce que j’y faisais ? La sieste… Je bullais sous la cloche d’un ciel qui donnait envie de chanter tellement il amplifiait mon esprit. (Oui, une souris a de l’esprit). D’ailleurs, je me souriais à moi-même dans mon sommeil. Perché sur mon nuage, je collais si bien à mon tapis que c’était merveille d’éprouver la douceur maternelle de ses fibres. La peur de glisser ne m’effleurait même pas. J’éprouvais une confiance absolue envers ce plein spatial qui appliquait sur moi la douce puissance de sa profondeur. Comment en étais-je arrivé là ? Par quel mystère avais-je été porté au sommet de cette sphère ? De quelle manière en redescendrais-je ? Ces questions ne me donnaient aucun souci. Pourtant je croyais entendre, qui montaient jusqu’à moi, par vagues ronflantes, soufflantes et remuantes, des bruits de guerre qui parasitaient le silence. Mon regard se coulait dans l’infini, tandis que les obscènes sonorités qui trahissaient le souk des intérêts sur la terre forçaient mes sens dans le but d’envahir ma jubilation mentale. Elles y réussirent

Précision :
Pour ceux qui ne l’auraient pas compris, la fin de chaque texte est le début de celui qui suit. De sorte qu’il s’agit d’un livre non linéaire, mais circulaire. Le texte numéroté 1 ( par convention), est en fait dans la continuité de celui qui sera le (faux ) dernier, à savoir le 16. C’est pourquoi le titre est Un cercle d’histoires. Dans ce cas précis, les sculptures ont été faites avant, selon l’impulsion du moment. En les rangeant sur la très longue table de mon atelier, en forme de cercle, j’ai pensé que je pouvais écrire une et des histoires à partir des sculptures. Donc, dans un cessons temps,  le texte a été déterminé par les sculptures. Mais le travail achevé, il s’est avéré que l’écrit et les formes se complétaient. L’écrit déchiffrant l’énigme des formes sans pour autant les épuiser. Cette interaction permet de dire des choses et d’aller vers des inconnus.
(Je tiens à préciser que tout cela n’a rien à voir avec les Arméniens, même s’il m’arrive de faire appel à mes propres cauchemars)

17 avril 2015

UN CERCLE D’HISTOIRES (10)

Filed under: UN CERCLE D'HISTOIRES — denisdonikian @ 6:24

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ça, nous avons déposé blessés et morts sur les navires et déchargé tout le nécessaire pour établir notre camp avant la tombée de la nuit. La colline dégoulinait du sang de tous les cadavres. J’ai vu un arbre du voyageur comme un éventail de chair qui déchirait le ciel. Des fougères arborescentes coupées net. Des troncs affalés par les rafales, des feuilles de bananiers déchiquetées en dentelures d’horrible rieuse. On avait glabré ce mont comme un cul. Alors, pour nous remettre, nous avons sorti guitares, ouds et violons. Chacun jouait sa part de nostalgie. Les sons coulaient sur les charognes. C’était une faisanderie qui remontait vers nous avec le vent de mer ; nos feux de camp qui dégageaient l’obscurité nous laissaient entrevoir les reliefs de nos combats. On jouait des airs brisés par la douleur d’avoir perdu des camarades. On rêvait l’œil dans les flammes à des choses infestées par la bouillie et le chaos. Par exemple que nos guitares, ouds et violons gisaient comme des géants autour desquels nous nous battions au plus près de nos ennemis. C’est alors que j’ai vu, monté sur la pointe redressée d’un archet, un cheval blanc sans cavalier. Il contemplait, aérien, le spectacle de la catastrophe qui mijotait comme une rampante pourriture. Plus je le regardais, plus me fascinait sa beauté. Par instants, mon être se détachait de ma propre vie pour habiter son corps. Mais ces instants se prolongèrent, et c’est ainsi que je me retrouvai ailleurs une souris

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Précision :
Pour ceux qui ne l’auraient pas compris, la fin de chaque texte est le début de celui qui suit. De sorte qu’il s’agit d’un livre non linéaire, mais circulaire. Le texte numéroté 1 ( par convention), est en fait dans la continuité de celui qui sera le (faux ) dernier, à savoir le 16. C’est pourquoi le titre est Un cercle d’histoires. Dans ce cas précis, les sculptures ont été faites avant, selon l’impulsion du moment. En les rangeant sur la très longue table de mon atelier, en forme de cercle, j’ai pensé que je pouvais écrire une et des histoires à partir des sculptures. Donc, dans un cessons temps,  le texte a été déterminé par les sculptures. Mais le travail achevé, il s’est avéré que l’écrit et les formes se complétaient. L’écrit déchiffrant l’énigme des formes sans pour autant les épuiser. Cette interaction permet de dire des choses et d’aller vers des inconnus.
(Je tiens à préciser que tout cela n’a rien à voir avec les Arméniens, même s’il m’arrive de faire appel à mes propres cauchemars)

15 avril 2015

UN CERCLE D’HISTOIRES (9)

Filed under: UN CERCLE D'HISTOIRES — denisdonikian @ 6:31

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notre pierre sur le mont de cote 881. La pente nous brisait les jambes, on nous tirait dessus de tous côtés. Les blessés voyaient leur sang faire les délices de la boue ; on ne savait plus si on marchait sur terre ou dans la viande ; des tripes, des bras, des pieds, des foies, des yeux, des cervelles couvraient les pierres, la ferraille et d’autres tripes, d’autres bras, d’autres pieds, etc. Speederman bondissait devant nous comme un invincible, Spacemouse glissait entre les morts, Canonball serrait les dents avec férocité (pas une couronne). Ces trois-là faisaient les mousquetaires royaux, entraînant les traînards à leur suite. Toute la colline débordait d’une souffrance de chien à cœur ouvert, maculée de tragédies sanglantes comme une peau de léopard dont chaque tache aurait été une plaie en état d’explosion. Des bouches lançaient des cris, ou poussaient des râles, appelaient maman, appelaient des femmes inconnues de tous les papillons qui agitaient leur éventail juste au-dessus des fleurs. «Je jure que si j’atteins le sommet de la colline… » Le gars était tombé brutalement comme un poids lourd. À peine s’il avait pris conscience que ce qui lui arrivait n’était qu’une fraction de seconde contenant l’infini. Celui-là s’appelait Rock et il avait 19 ans. J’ai écouté son cœur. Plat sans résistance. Je suis reparti en hurlant : « Je vais tous les tuer ! » Au fur et à mesure qu’on s’élevait, les coups de feu ennemis suffoquaient sous les nôtres. Les obus tirés par les navires avaient mis fin à l’hégémonie des chacals. J’ai regardé derrière moi. Les rescapés étaient couchés dans les plis du terrain et canardaient les coins suspects. Nous n’étions plus que quatre à jouer aux guignols avec nos surnoms américains tirés de B.D. pour gosses. Speederman avait gagné les autres de vitesse. La coutume voulait que les vainqueurs soient pris en photo avec un drapeau US. On a trouvé un tube qui faisait bien six mètres, on y a accroché notre bannière. Speeder a vu un mort, ou presque mort, pas tout à fait nu, et couché sur le dos. Il lui a fiché le tube dans la poitrine et on a tous poussé derrière, si bien qu’il a traversé le corps pour aller s’enfoncer dans la glaise avec un bruit d’arme blanche en train de pénétrer dans une viande vivante en pleine stupéfaction. Le type avait gardé le sourire, un sourire de transit pour l’au-delà. Et Joe nous a pris en photo, au moment où je cherchais le mât pour appuyer avec les autres de tout notre poids d’Américains sur ce corps qui ouvrait grand les bras au ciel. Je me souviens qu’après

 

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Précision :

Pour ceux qui ne l’auraient pas compris, la fin de chaque texte est le début de celui qui suit. De sorte qu’il s’agit d’un livre non linéaire, mais circulaire. Le texte numéroté 1 ( par convention), est en fait dans la continuité de celui qui sera le (faux ) dernier, à savoir le 16. C’est pourquoi le titre est Un cercle d’histoires. Dans ce cas précis, les sculptures ont été faites avant, selon l’impulsion du moment. En les rangeant sur la très longue table de mon atelier, en forme de cercle, j’ai pensé que je pouvais écrire une et des histoires à partir des sculptures. Donc, dans un cessons temps,  le texte a été déterminé par les sculptures. Mais le travail achevé, il s’est avéré que l’écrit et les formes se complétaient. L’écrit déchiffrant l’énigme des formes sans pour autant les épuiser. Cette interaction permet de dire des choses et d’aller vers des inconnus.

(Je tiens à préciser que tout cela n’a rien à voir avec les Arméniens, même s’il m’arrive de faire appel à mes propres cauchemars

14 avril 2015

UN CERCLE D’HISTOIRES (8)

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pour lequel les hommes se sont écrabouillé la gueule. On a même vu des religions qui n’hésitaient pas à putréfier le grand air que respiraient les naïfs, les sauvages, les nus, pour les phagocyter avec je ne sais quel écrit torturant. Des livres de grand amour, brandis comme des armes à feu et devenus des instruments strangulateurs. Ainsi partaient les Croisés pour délivrer Jérusalem. Lieux saints, quels crimes en votre nom ! Évangile contre Coran. À Malte, les chevaliers cassaient du Turc solimaniote. Ils avaient de l’armure sur leur foi. Sacré Nom de Dieu à défendre, mais qui avait dû battre en retraite d’une île à l’autre en Méditerranée. Pendant ce temps, les rats faisaient leur vie du noir profond des cachots. Ils font toujours leurs courses partout où nous agonisons. La terre avait un éclat de cristal et le temps n’était qu’une vague au milieu des vagues. À présent, il s’agit de savoir comment les hommes vont traiter avec les hommes. Les horloges nous engluent dans le criant de nos machines. Les affairés de l’histoire ferraillent avec les pernicieux qui font les parfaits dans une aérienne stagnation de leur esprit. C’est la lutte roseau contre tempête. À qui saura rendre lumineux l’opaque impersonnel qui nous emboîte dedans et dehors. On croit la science meilleure que les puissances intimes. On croit les puissances intimes meilleures que la science. Ce jour-là nous étions quarante à rouler

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Précision :
Pour ceux qui ne l’auraient pas compris, la fin de chaque texte est le début de celui qui suit. De sorte qu’il s’agit d’un livre non linéaire, mais circulaire. Le texte numéroté 1 ( par convention), est en fait dans la continuité de celui qui sera le (faux ) dernier, à savoir le 16. C’est pourquoi le titre est Un cercle d’histoires. Dans ce cas précis, les sculptures ont été faites avant, selon l’impulsion du moment. En les rangeant sur la très longue table de mon atelier, en forme de cercle, j’ai pensé que je pouvais écrire une et des histoires à partir des sculptures. Donc, dans un cessons temps,  le texte a été déterminé par les sculptures. Mais le travail achevé, il s’est avéré que l’écrit et les formes se complétaient. L’écrit déchiffrant l’énigme des formes sans pour autant les épuiser. Cette interaction permet de dire des choses et d’aller vers des inconnus.
(Je tiens à préciser que tout cela n’a rien à voir avec les Arméniens, même s’il m’arrive de faire appel à mes propres cauchemars).

13 avril 2015

UN CERCLE D’HISTOIRES (7)

Filed under: UN CERCLE D'HISTOIRES — denisdonikian @ 6:37

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c’est le serpent monétaire qui sert de guide à l’économie d’un monde mis en coupes réglées. Sa tête crache le feu de tous côtés, sa queue coupée en tranches laisse derrière lui des ronds de métal portant des effigies d’hommes connus dans leur pays d’origine pour leur vertu, leur savoir, leur courage, leur fonction : Aristote, Pasteur, le roi Juan Carlos, Roosevelt, Jean Moulin, Jacques Rueff, Guynemer, Le Caudillo, Napoléon III. On dirait des têtes de noyés qui flottent au fil de l’eau en épousant les remous provoqués par l’horrible animal économique. Mais, examinez bien ces pièces, vous y découvrirez des intrus : un bouton à quatre yeux, une pièce percée en son centre, une rondelle métallique, un joint de robinet, une médaille (cherchez laquelle). Ils jouent à parodier l’argent, présents comme lui à la parade de la grande finance universelle pour l’insulter avec leur vide au ventre et le peu de poids qu’ils représentent. Et puis il y a le roi. Caché dans un trou individuel entre le reptile cuivré et la menue monnaie qui roule derrière, il laisse émerger un bout de couronne et un œil fort inquiet. Je suis sûr qu’il est assis sur ses réserves d’or, si bien assis qu’il parvient à les dissimuler entièrement avec son gros ventre. Il voit venir la monétaille, venir sur lui, grandir, avec la peur de mourir écrasé. Car il aura beau rentrer dans sa coquille, un jour les autres seront là à vouloir le déterrer afin qu’il restitue au peuple ce qui lui appartient. C’est-à-dire le pouvoir, tout le pouvoir,

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Précision :
Pour ceux qui ne l’auraient pas compris, la fin de chaque texte est le début de celui qui suit. De sorte qu’il s’agit d’un livre non linéaire, mais circulaire. Le texte numéroté 1 ( par convention), est en fait dans la continuité de celui qui sera le (faux ) dernier, à savoir le 16. C’est pourquoi le titre est Un cercle d’histoires. Dans ce cas précis, les sculptures ont été faites avant, selon l’impulsion du moment. En les rangeant sur la très longue table de mon atelier, en forme de cercle, j’ai pensé que je pouvais écrire une et des histoires à partir des sculptures. Donc, dans un cessons temps,  le texte a été déterminé par les sculptures. Mais le travail achevé, il s’est avéré que l’écrit et les formes se complétaient. L’écrit déchiffrant l’énigme des formes sans pour autant les épuiser. Cette interaction permet de dire des choses et d’aller vers des inconnus.
(Je tiens à préciser que tout cela n’a rien à voir avec les Arméniens, même s’il m’arrive de faire appel à mes propres cauchemars).
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